TVA & services numériques : dernières interprétations de la CJUE & évolutions législatives

Encyclopédie

L'évolution rapide de l'économie numérique pose des défis considérables en matière de TVA, particulièrement avec l'émergence de nouveaux modèles d'affaires et l'application du projet ViDA. La CJUE continue d'affiner sa jurisprudence pour adapter les règles fiscales européennes aux réalités du numérique.

Une transformation législative majeure avec le projet ViDA

Le 11 mars 2025, le Conseil de l'Union européenne a définitivement adopté le train de mesures sur la "TVA à l'ère numérique" (ViDA), marquant une étape décisive dans la modernisation du système fiscal européen. Cette réforme, qui entrera en vigueur vingt jours après sa publication au Journal officiel, transforme fondamentalement l'approche de la TVA sur les services numériques.

Les nouvelles obligations pour les plateformes numériques

À compter du 1er janvier 2030 (ou du 1er juillet 2028 sur option), les plateformes en ligne devront payer la TVA sur les services de location de logements de courte durée et les services de transport de voyageurs dans la plupart des cas où les prestataires de services individuels ne facturent pas la TVA. Cette mesure vise à combler une lacune fiscale importante où de nombreux prestataires individuels échappent aux obligations TVA, malgré la déclaration DAC 7.

La digitalisation complète des obligations déclaratives

D'ici 2030, les obligations de déclaration en matière de TVA seront entièrement numérisées pour les opérations transfrontières entre entreprises, s'appuyant sur un système de factures électroniques et de déclaration en temps réel. Les entreprises émettront des factures électroniques pour les opérations transfrontières B2B et déclareront automatiquement les données à leur administration fiscale. Cette digitalisation simplifiera notamment le calcul de la TVA pour les entreprises opérant dans plusieurs États membres.

L'évolution jurisprudentielle de la CJUE

Clarifications sur les établissements stables en TVA

Le 13 juin 2024, la CJUE a rendu un arrêt important dans l'affaire C‑533/22 SC Adient Ltd & Co. KG, précisant à nouveau les critères de reconnaissance d'un établissement stable en TVA. Cette décision s'inscrit dans la construction prétorienne de la Cour pour différencier les règles TVA des concepts traditionnels d'établissement stable applicables à l'impôt sur les sociétés.

Points clés de la décision :

  • Les règles TVA bénéficient d'une autonomie complète par rapport aux règles de l'impôt sur les sociétés
  • Les mêmes moyens techniques et humains ne peuvent pas être utilisés simultanément pour participer à des services dans un État membre et pour recevoir ces mêmes services
  • La reconnaissance d'un établissement stable détermine l'État membre ayant le droit de taxer le service

Opérations complexes et services numériques

La jurisprudence récente précise l'approche à adopter pour les offres composites dans le secteur numérique, notamment lorsque plusieurs droits d'accès avec des périmètres de services différents sont commercialisés au sein d'une même offre.

Exemples pratiques :

  • Un fournisseur de services numériques proposant des services de base avec des options payantes
  • La commercialisation d'offres à prix croissant incluant l'accès aux services précédents plus des services additionnels

Les nouvelles règles de territorialité

Services culturels et sportifs virtuels

À compter de 2025, les prestations de services relatives à des manifestations culturelles, artistiques, sportives, scientifiques, éducatives ou de divertissement réalisées de manière virtuelle seront taxées au lieu d'établissement du preneur, qu'il soit assujetti ou non.

Cette évolution majeure distingue :

  • Pour les opérations B2B : application de la règle générale (lieu d'établissement du preneur assujetti)
  • Pour les opérations B2C : taxation en France uniquement si le preneur non-assujetti y est établi

Impact sur la franchise en base

Le régime de franchise en base de TVA sera mis en conformité avec le nouveau régime unifié des petites entreprises applicable dans l'Union européenne à compter du 1er janvier 2025. Les plafonds seront abaissés et ne feront plus l'objet d'actualisation triennale, avec cessation immédiate en cas de dépassement.

Implications pratiques pour les entreprises

Recommandations opérationnelles

Audit des modèles d'affaires : Vérifier la qualification des prestations au regard des nouvelles règles de territorialité, notamment pour calculer la TVA applicable selon le lieu de prestation.

Mise en conformité technologique : Préparer les systèmes pour la facturation électronique obligatoire d'ici 2030, en s'appuyant sur des outils afin d'améliorer les bases clients et fournisseurs.

Gestion des plateformes : Anticiper les nouvelles obligations pour les services de location courte durée et transport, incluant la gestion du numéro de TVA des prestataires.

Optimisation fiscale : Réévaluer les structures au regard des critères d'établissement stable clarifiés par la CJUE, notamment pour les groupes TVA.

Points de vigilance

  • La notion d'opération complexe unique reste déterminante pour la qualification fiscale des offres numériques
  • Les services virtuels bénéficient d'un traitement spécifique nécessitant une analyse au cas par cas
  • L'interopérabilité des systèmes nationaux devra être assurée d'ici 2035
  • La gestion de la TVA collectée nécessite une attention particulière dans ce nouveau contexte

Perspectives d'évolution

Calendrier ViDA

2025 : Fin de l'obligation d'approbation de la Commission pour les systèmes nationaux de facturation électronique

2027 : Extension des guichets uniques (OSS) à l'électricité, gaz et chauffage

2028-2030 : Déploiement complet du système européen de facturation électronique

Enjeux de mise en œuvre

Les administrations fiscales nationales partageront les données au moyen d'un nouveau système informatique capable de fournir des analyses des activités suspectes, renforçant significativement la lutte contre la fraude à la TVA. Cette évolution permettra également une meilleure gestion des crédits de TVA transfrontaliers.

Points clés à retenir

La transformation du paysage fiscal européen en matière de services numériques s'accélère avec l'adoption du projet ViDA et l'évolution constante de la jurisprudence de la CJUE. Les entreprises doivent dès maintenant anticiper ces changements pour adapter leurs processus et structures fiscales aux nouvelles exigences, notamment en utilisant des outils de calcul TVA adaptés aux spécificités européennes.

Pour les entreprises internationales, la vérification du numéro de TVA et l'utilisation d'un VAT checker deviennent essentielles dans ce nouveau cadre réglementaire.

Chez Cyplom, nous accompagnons nos clients dans cette transition en proposant des solutions d'automatisation et de mise en conformité adaptées aux spécificités de chaque secteur d'activité. Notre expertise en droit fiscal européen et notre maîtrise des outils technologiques permettent une approche pragmatique et sécurisée de ces évolutions réglementaires.

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